L’ère de la pop virale

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Avant le règne de l’internet, un succès de musique pop suivait généralement le processus linéaire suivant : une riche compagnie de disques signait un contrat avec un artiste ou un groupe, produisait son album, choisissait un titre prometteur, faisait pression sur les stations de télé et de radio pour passer ledit titre, et engrangeait les revenus de la vente des cédés (vinyles, cassettes).

On le sait, les règles ont changé et les supports de diffusion ont volé en éclats. La création d’un succès musical populaire est sans doute plus subtile, mais un schéma ressort clairement ces derniers temps, et je m’aperçois que je suis devenu malgré moi un rouage de cette nouvelle logique, chose que je refusais autrefois avec la véhémence du végétarien à qui on tend un hot-dog.

La pop est devenue virale. Et quand je dis pop, je veux dire musique populaire, même si ça sonne soul, rock, funk ou électro.

En 2014, la combinaison gagnante pourrait se modéliser ainsi. Un producteur de musique (petit ou gros) lance sur Youtube le clip de son poulain. Parfois, le poulain s’en charge lui-même. Pour des raisons trop longues et trop hasardeuses à expliquer, la chanson devient virale et vous la voyez passer sur votre mur Facebook. Fin du premier acte. Deuxième acte : la chanson (ou son clip) fait l’objet de reprises qui elles-mêmes deviennent virales et alimentent en amont le succès de la version originale. En effet, pour bien apprécier une reprise, il vaut mieux connaître le point de départ.

D’abord hésitant, ce cheminement viral semble se renforcer à chaque nouveau «hit», et il n’y a habituellement qu’un seul vrai gagnant à la fois, comme si Internet devait se relubrifier les tuyaux avant d’accueillir le ver d’oreille suivant.

Comme j’écris ce texte en mars 2014, je vais prendre l’exemple de la saveur du mois, le très jouissif Happy, de Pharrell Williams.

Si j’en crois Youtube, il est apparu en ligne le 21 novembre 2013, mais la plupart d’entre nous ne l’ont vu et entendu que vers la fin du moins de février. Il serait humainement impossible d’en recenser les covers, mais j’ai, comme vous sans doute, ma liste d’artistes sans lesquels je considère qu’un succès n’a pas atteint son plein potentiel viral : les néo-hippies de Walk Off the Earth, le quintette vocal Pentatonix, mes chouchous de Pomplamoose (qui ont ici opté pour un medley). J’attends bien sûr la version acoustique de l’incontournable Jimmy Fallon & The Roots, et la suite du tsunami de reprises tout aussi inspirées, dues cette fois à de parfaits inconnus. Par exemple : un violoniste de rue, un joueur de ukulélé asiatique de 6 ans, une imprimante à aiguilles ou un mime péteur avec une scie musicale.

Ce n’est pas le chemin de cette chanson que je veux illustrer ici, mais bien celui de celles qui l’on précédée et de celles qui la suivront. Car avant Happy, c’était Get Lucky, précédé de Blurred Lines, précédé de Thrift Shop, précédé de Call Me Maybe, précédé de Somebody That I Used to Know, précédé de finissez cette liste vous-même.

Si je connais toutes ces mélodies, si vous les connaissez aussi, c’est la preuve que ça fonctionne et qu’il y a un peu de nous dans le processus. Tiens, ça me donne l’idée de créer une plateforme pour partager ce genre de vidéos. Je l’appellerais Votre tube

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